Bartleby • Alex Selmane

Bartleby

La fable
Le narrateur est un notaire qui engage dans son étude un dénommé Bartleby pour un travail de clerc. Au fil du temps, cet employé qui s’est d’abord montré travailleur, consciencieux, lisse, ne parlant à personne, révèle une autre part de sa personnalité : il refuse tous les travaux que lui demande son patron. Il ne les refuse pas ouvertement, il dit simplement qu’il « préférerait ne pas » les faire, et ne les fait pas. Puis peu à peu, Bartleby cesse complètement de travailler, mais aussi de sortir de l’étude, où il dort. Il refuse même son renvoi par son employeur. Bartleby fera vaciller toutes les certitudes du narrateur et leur relation se déroulera au fil de nombreuses péripéties drôles et émouvantes.

Alex SELMANE, ma triade

En 2000, je jouais Emmanuel Darley avec son épatant Pas bouger. Puis cet auteur, qui nous a quitté il y a peu, m’écrivit en 2001 Qui va là ?, un monologue à jouer en appartement. Il me dit alors : « J’ai écrit un récit, Une ombre, j’aimerais bien qu’un jour tu t’en empares au théâtre ».
J’ai repris Qui va là ? après sa disparition en 2018 et son ombre s’est invitée à nouveau.

En 2020, alors que nous étions tous privés de jouer en ces temps de pandémie, Eric Guennou, compositeur/musicien/sonorisateur et ô combien exceptionnel compagnon de route, m’invita à créer L’érosion de Charles-Eric Petit sous la forme d’une lecture-concert (et qui le restera) rebaptisée depuis « concerto-griot ».
Ceci fut rondement mené et avec allégresse depuis le printemps 2022, et L’érosion est assurée d’un bel avenir au vu du succès rencontré et de ses perspectives de diffusion…

Et voilà que j’ai commencé à associer sensiblement L’érosion et Une ombre… Un diptyque ?
Soudain,
Bartleby le scribe, qui m’avait toujours mis sens dessus dessous, a ressurgi de loin et s’est imposé comme le troisième volet d’une trilogie que je veux faire traverser aux spectateurs en ma compagnie.
Il se trouve que dans L’érosion, il y a celui qui est libre désormais de son temps de vie puisqu’il est exempté de travail, non pas privé mais juste exempté…
Il se trouve que dans Une ombre, il y a celui à qui l’on parle si peu, qui ne parle à personne et se parle surtout à lui-même, terriblement échoué…
Il se trouve que dans Bartleby le scribe, il y a celui qui a tellement besoin de vivre mais qui a tant peur d’exister… et cette figure questionnant toujours aussi terriblement notre monde. Bartleby comme un témoin de notre existence, nous renvoyant à cette question : que devons-nous en faire ?

Alors moi « simple acteur », je vais suivre le fil rouge de ces trois textes, indépendamment les uns des autres dans un premier temps. En compagnie du musicien Eric Guennou pour L’érosion, du metteur en scène et complice Dag Jeanneret pour Une ombre et de Jean-Baptiste Tur, metteur en scène que je me devais de rencontrer, pour Bartleby. Et tenter de nous raconter…

 


Jean-Baptiste TUR, à propos de la mise en scène

Quand Alex Selmane m’a parlé de sa Triade et de son désir de la clôturer par Bartleby d’Herman Melville, j’en ai tout de suite compris l’évidence.
Les figures qu’il incarne dans les deux premiers volets sont les narrateurs de leur propre marginalité ou marginalisation, leur « être à côté ». Bartleby, tel que l’a écrit Melville, est le récit qu’un homme en place, en fin de carrière, fait d’une rencontre qui a bouleversé, pour un temps au moins, tous ses repères. C’est la narration de quelqu’un de normé, de normal qui vit pleinement dans les codes de la société et qui se trouve absolument déstabilisé par la formule et donc la prise de position d’un individu qui face à des injonctions « préfèrerait ne pas ».
Il me semble donc que la confession de cet homme, le partage de cette expérience avec des spectateurs.rices, se suffit en lui-même et qu’Alex Selmane est le parfait acteur pour l’incarner.
Il suffirait, pour que cela nous parvienne de façon plus limpide aujourd’hui, de déplacer le texte de son Wall Street du début du capitalisme à un Wall Sreet de tout âge, donc de maintenant puisqu’il reste le berceau et le centre de ce système.

La mise en scène se concentrera sur le rapport acteur-spectateur. Une sorte de conférence qui vire au récit dans un espace de bureau très actuel, un open space qui se déstructurera.
Un solo plutôt, car comment incarner celui dont il est toujours question et qui au delà d’un personnage est un concept de désobéissance, de révolte en creux, un concept en soi : le fameux Bartleby.
Un solo ou presque, car il y aura au plateau un musicien/compositeur de musique électronique pour créer un paysage sonore contemporain et ultra urbain, pour rythmer et accompagner le récit ; mais aussi pour quelque fois incarner Bartleby par la voix, seulement avec le « je préfèrerais ne pas » ou par une présence silencieuse…

Une forme plutôt légère donc dans une adresse directe, intime et sans détour au public.
Un moment de partage où nous pourrions reconsidérer ensemble les cadres, les contraintes et les injonctions que nous acceptons, subissons, intégrons toutes avec le génie et surtout l’humour sarcastique de Melville.


Plus d’informations sur la compagnie

 

Du 30 septembre au 5 octobre 2024
• Résidence de création •

 

 

Bartleby

d’après la nouvelle d’Herman Melville (Editions Libertalia, 2020)
traduction Noëlle de Chambrun et Tancrède Ramonet

 

Mise en scène :
Jean-Baptiste TUR, avec Alex SELMANE
Musique et musicien :
Allister SINCLAIR
Scénographie :
Cécile MARC
Lumières :
Claire ELOY
Durée : 1h

 

Production
Compagnie Nocturne
Coproductions

Théâtre Jean Vilar, Ville de Montpellier
Ville d’Alénya
Résidence de création
Théâtre Jacques Cœur, Ville de Lattes
Soutien

Hangar Théâtre, Montpellier

 

© photo : Luc Sabot

 

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